lundi 26 juin 2017

A bicyclette

« Quand on partait de bon matin
Quand on partait sur les chemins
A bicyclette »

Et bien, ça vaut le coup de se construire une playing list pour l’Ironman, si c’est pour que Charles TRENET passe en boucle dans mon esprit embrumé.

Il faut avouer que le rythme de la première demi-heure de cette sortie dominicale avoisine plus celui d’une balade bucolique, qu’un travail de tempo sur « Youth gone wild » de Skid Row. Mais peu importe, le lave-vaisselle est vidé, le petit déjeuner prêt à être servi pour mes chéries et j’étais sur le vélo dès 8h, après une petite nuit. La faute à un barbecue avec les voisins, qui ne s’offusquent plus que je ne boive pas d’alcool et que je les reçoive avec des chaussettes de contention (véridique !). Surtout, l’essentiel dans tout ça, c’est la longueur de la sortie prévue.

5h ! 5h de selle à venir. Quenotte pourra vous confirmer mon appréhension à la vue de cette (nouvelle) barrière à franchir : pouvoir rouler longtemps. Certes, j’ai enfilé les virées de 4h avec David et Martin comme des perles. Mais là, j’ai 1h de plus à faire, seul de surcroît. Alors, je n’utilise qu’une seule fonction sur le compteur (le chrono, pour caler mes prises de boisson et de solide), tandis que j’expérimenterai, avec bonheur, les fameuses chaussettes de contention sur le vélo. J’ai souvent des fourmis, liées à la position aéro et la pression sur le périnée, aggravée par un patrimoine génétique peu aidant pour la circulation sanguine ... Mais, comme je l’indiquais dans mon billet d’octobre 2016 « les varices s’opèrent » et on peut gagner en confort avec un peu d’équipement et de réflexion. Autrement (et mieux) écrit par IronBipBip, en en-tête de son blog : « Pour atteindre un objectif, soit on se donne les moyens, soit on se trouve des excuses. ». Si après cet adage inspirant, vous n’allez pas sur son blog, c’est à n’y rien comprendre …
 
Premier arrêt pipi au bout d’une heure. J’en profite pour dévisser le câble de dérailleur d’un quart de tour car les vitesses craquaient un peu. Cette facilité surprendrait Ben, qui m’a vu démonter entièrement des cocottes pour le même symptôme, mais avec un résultat plus catastrophique...

Bref, les kilomètres et les paysages défilent bien. J’ai choisi de rejoindre le territoire des petits hommes verts (MSA Triathlon, dont la page Facebook, animée par Bertrand est toujours amusante) et d’y faire 2 tours de 60-70 bornes. L’avantage, c’est que cela évite la monotonie de mes boucles de la Seine habituelles. L’inconvénient, c’est qu’en voulant éviter une portion de route trop fréquentée, je tricote dans la campagne une bonne demi-heure : Blainville-Crevon, Saint-Aignan sur Ry, etc. Mais peu importe ! C’est joli et le rythme est bon. Je ne ferai qu’un tour, que je rallongerai par des petites boucles, que je maîtrise mieux sur Barentin et Duclair. Lucidité et confiance, sont deux qualités essentielles pour venir à bout de l’Ironman et des aléas multiples qui le composent. Une bonne occasion de les travailler.

Au bout de 3h de chevauchée, revenu sur des routes plus connues, j’entends un « paf » caractéristique. Pas celui d’une crevaison : ça fait « pshiiiit », si elle est lente, et « boom », si elle est soudaine. C’est le « paf » de l’insecte qui percute ton casque. C’est pas que j’ai autant de moucheron à la fin du vélo qu’une voiture en sortant de l’autoroute (je ne roule pas aussi vite ^^), mais celui-ci me pique héroïquement avant de mourir. La douleur de la piqûre m’invite à m’arrêter à la Ferme des Authieux. C’est sécurisant, car je pourrai y trouver de l’eau si j’en ai besoin et, au pire, du secours. J’utilise le mode photo du téléphone (puisque le GPS a été inutile lorsque j’étais dans la pampa !) pour m’assurer que ce n’est pas trop gonflé. Je peux repartir tranquille. Encore 2h à faire : « juste une sortie d’oxygénation ».


Ce mantra fonctionnera vraiment bien. J’avale les kilomètres avec une facilité déconcertante. N’hésitant pas à inclure des (petites) montées sur le parcours. Les côtes de Saint-Pierre de Manneville et de de Saint Martin de Boscherville sont une formalité. Je passe même la première entièrement sur la plaque. C’est vrai qu’elle est roulante, mais après 110 km, je ne pensais pas l’aborder aussi bien …


… Ah bah voilà ! Il y en a encore qui lisent avec naïveté, tout ce que j’écris. Mais puisque je vous dis que je n’ai pas regardé une seule fois le kilométrage sur mon compteur ! Effectivement, ce n’est qu’à la lecture de ce dernier, une fois arrivé à la maison, que je déduirais cette distance. Au final, j’ai parcouru 137 km en 4h54. Un 28 km/h encourageant compte tenu de la nouveauté de l’exercice et de la charge de travail prédécente, inversement proportionnelle à ma nuit de sommeil. A ce propos, je crois bien qu’entre ce samedi soir et le dimanche midi, j’ai passé plus de temps sur le vélo qu’avec ma femme. La vie de triathlète est une question de priorité …





dimanche 11 juin 2017

Barrières et chaînes


Il y a des instants privilégiés, dont on ne se lasse pas.

Le temps et le moral sont au beau fixe. Et, surtout, les barrières physiques et mentales se lèvent à mesure que l’entraînement me pousse à dépasser mes limites. En fait, le deuxième phénomène explique en grande partie le premier … si vous me suivez.


Quelle semaine ! 

Plus de 7 bornes de natation, 200 de vélo et près d’un marathon en une semaine de plus de 15h. Jamais, je ne m’étais entraîné à ce point. C’est plus que la distance que je couvrirai le 27 août. En un jour certes. Mais, longtemps, je ne m’imaginais pas capable de réaliser cela.

Il faut dire que la moitié de ce volume a été réalisé à la faveur du Lundi de Pentecôte et de ma Team Vichy. D'abord, 3,2 km à barboter et se repérer dans le plan d’eau de Jumièges. Ensuite, 90 km seul à vélo, après que David nous ait quitté et que nous ayons convenu avec Quenotte de réaliser chacun les 3 autres boucles du parcours à son rythme. Nous avions fait 30 bornes ensemble. J’additionne et paf 120 bornes au compteur, l’air de rien. La suite, c’était 3 tours de 7,5 km en course à pieds. Je suis parti trop vite, suivant le rythme et la conversation enthousiaste de Quenotte et j’ai pris cher sur les 2 tours suivant. C’est le métier qui continue de rentrer.




Parlant d’apprentissage et de barrière, c’est mon estomac qui m’a surpris. J’avais lu des tas de trucs sur sa mise en veille lors des épreuves longues. Ben, entre autres, m’avait indiqué combien la gestion de l’alimentation devenait difficile, passée 6h de courses. Il avait raison. Je n’avais jamais expérimenté.

« Connaître n’est pas savoir ». Et la « barrière » ne se lève pas immédiatement après l’effort. Le Chemin du Halage garde quelques souvenirs de la banane, que j’ai avalée après avoir terminé ce premier véritable « big training day », riche d’enseignements.




Je relançais la machine dès le mercredi. Impossible (logiquement) de mettre de l’intensité dans les séances, mais le volume était là, malgré la fatigue. Une natation vendredi de 3,9 km, rendue plus agréable grâce à Romaric, qui a réussi à faire nager Simone et Jacqueline à côté de ma ligne d’eau. Simone et Jacqueline, vous les connaissez tous. Ce sont celles qui nagent en palme à deux de front et prennent les deux-tiers de la largeur de la ligne d’eau. On a tous des Simone et des Jacqueline ! Et là, c’est cool d’avoir un Romaric en maître-nageur. Bref, j’ai la distance Ironman dans les bras. Les plus précis d’entre vous s’offusqueront et indiqueront que l’Ironman se nage sur 3,8 km. Certes, mais je compte déjà nager au moins 100 m de plus. 100 m pour rejoindre la bouée après avoir volontairement longé la rive, lorsque je serai à contre-courant. En nage en eau vive, il y a les bras pour avancer, les yeux pour se repérer et un cerveau. Samedi, c’était 3h de vélo, qui sont désormais une formalité. « Quelle belle machine, on a ! », lançais-je à Quenotte encore vendredi soir.


Is it gonna get easier than tryin' to break these chains around my heart
Oh oh
Does it ever get easier, without you I can't pull these chains apart
Oh oh


These chains des incontournables TOTO, avec une partie sublime de Jeff à la batterie.


Des chaînes qu’on brise ou les barrières qu’on franchit. Tout cela nous ramène à mon article d’octobre : « Libéré, délivré » .

Mais au-delà du plaisir de vous imaginer en train de rager à l’idée de cette chanson qui ne vous quittera pas de sitôt, c’est surtout ce travail sur la 4ème discipline du triathlon : la gestion de l’énergie, alimentaire et mentale ! A l’image du glycogène qu’on s’évertue à stocker dans les jours précédents l’Ironman, c’est la confiance dont je fais le plein, espérant ne jamais être en rupture de stock …


jeudi 1 juin 2017

Form’Olympique



Pour ceux qui ont peu de temps ou peuvent me trouver trop littéraire, voici un résumé de mes réactions à l’arrivée du Triathlon, format Olympique, de Pont-Audemer. En voici la traduction, pour les autres :



2h32 ? …

Moi ?

Ils se sont plantés dans le chronométrage ou il me manque un tour de course à pieds ?

Beh, non ! J’ai (enfin) bien tourné. Arnaud avait bien raison « quand tu seras sur l’Ironman, tu ne te seras jamais senti aussi fort … » 


Pour le moment, j’occulte la dernière partie de sa phrase, histoire de ne pas gâcher mon plaisir : « … et c’est justement à cause de cela qu’il ne faut pas s’enflammer. Etre vigilant et en garder sous la pédale à vélo pour ne pas arriver trop entamer sur le marathon. »

Pour le moment, je savoure, en faisant une trempette salvatrice dans le plan d’eau.

Cela étant, à quelques minutes du départ, c’était plutôt "smiley-stress". L’émoticône n’existe pas, mais l’émotion était bien là. « J’ai le trac, Xavier. Heureusement que je me suis aligné sur ce triathlon avant Vichy. Je ne me souvenais plus à quel point on pouvait flipper ». Ses encouragements et ces mots me permettent de me concentrer. Si, je suis là, c’est effectivement pour retrouver les sensations et les gestes d’une compétition, comme me le redisait David, hier. C’est aussi pour expérimenter la course en pré-fatigue. Option validée par Coach-BipBip mercredi soir. Exercice (86 km de vélo) réalisé avec David, donc, le samedi matin. Heureusement qu’il était là. En le rejoignant après 1h de vélo, je me sentais fatigué. J’avais l'impression de ne pas pouvoir appuyer sur les pédales. Il faut dire que la semaine avait été chargée, notamment avec un enchaînement vélo-course à pieds, comportant des répétitions à allure de course, jeudi, pour une durée de 3h. C’est, bien entendu, bien plus que le temps que je réalise sur un distance olympique. Je n’appréhende donc pas tant la durée de l’effort, que le fait de le réaliser avec cette semaine de charge. Autre donnée : c’est le seul triathlon, que j’ai programmé avant Vichy. Il ne faut donc pas que je me rate ; perdant ainsi le capital-confiance, que je cumule depuis le début de ma préparation. Dernier objectif assumé : accrocher mon meilleur temps sur la distance : donc, passer sous les 2h40. Pas par prétention, mais pour me confirmer que mon entraînement va dans le bon sens, engendrant performance et tout en évitant la sur-fatigue. Une fois que je vous ai écrit çà, avouez qu’il y avait de quoi être un peu stressé par l’enjeu, non ?

La corne de brume m’extirpe de ces réflexions. Je suis serein. Après quelques décamètres, je perds les pieds de Xavier, mais je gagne les phalanges, les coudes et même le torse des concurrents. Près de 320 triathlètes dans l’eau (les filles sont parties 7 mn devant) : c’est dense. Ca cogne à n’en plus finir. J’ai de la buée dans mes lunettes, mais reste lucide et confiant. Pas d’essoufflement et de tasses, malgré le contexte. Je profite de la sortie à l’australienne pour évacuer la buée me rejette dans la « washing-machine ». J’ai un théorème, qui vaut ce qu’il vaut : « si tu prends des coups, c’est que t’es dans l’coup ». Comprendre ici, que tu es avec le plus gros des triathlètes ; ce qui, vu mon niveau en natation, est toujours appréciable.




Après une légère erreur d’orientation et avoir servi de cheval d’arçons à un concurrent, je sors de l’eau, plutôt content. C’est la première fois que je nageais en 2 temps : j’ai l’impression que ça m’a bien réussi.

Je parle d’impression, car je cours sans montre aujourd’hui. Je ne la retrouvais pas et ne voulais pas me stresser. C’était aussi une bonne occasion d’expérimenter cette philosophie. Effectivement, la prise d’informations chronométriques en course à pieds et en natation m’aurait stressé pour rien.

Pour rien, car avec 30mn, j’ai réalisé le 171ème chrono sur 357, pas si loin de Caro et Xavier qui sont plus forts que moi dans l’exercice. Or, ce temps n’est pas le meilleur que j’ai réalisé sur la distance. Me focaliser sur cet indicateur m’aurait induit en erreur ! Quant à la course à pieds, je ne sais que trop combien la visualisation du temps et de la perte de vitesse peut impacter le moral et la performance. Égarer sa montre : quel bel acte manqué !

Mais, revenons à nos moutons … ou à nos vélos ! J’arrive en même temps que mon voisin de parc, mais son Argon part avant moi. Je suis un peu vexé de ne pas avoir été plus rapide sur ma transition, sur laquelle je m’étais pourtant appliqué. Je le reprends dès le premier coup de cul, me pose sur le prolongateur et « en voiture Simone ». J’ai choisi Pont-Audemer, car c’est le triathlon le plus plat chez nous. L’occasion de travailler la position aéro que je devrai tenir un bon bout de temps à Vichy. Je double pas mal de concurrents et suis en pleine confiance.

Joie de courte durée, en voyant tout un paquet de "drafteurs qui sucent sur le plat et jouent le maillot à poids sur les deux bosselettes du parcours" (dixit Quenotte dans son résumé de la dernière édition). Belle mentalité ! D’autant plus agaçante qu’aucun d’entre eux ne m’a indiqué que j’avais perdu mon bidon, comportant mon matériel de réparation. Ils font peu d’efforts et pourront galoper en course à pieds, comme je l’ai fait à Beauvais où le drafting était autorisé. S’il y a eu des débats sur le lieu de la capitale de la Normandie, il n’y en a aucun sur la désignation de la capitale du drafting : c’est bien Pont-Au ! Mais peu importe. Je reste concentré sur l’alimentation, mon rythme et la distance de 7m à respecter avec celui qui me précède. Je suis lucide et c’est un bon exercice dans la perspective de Vichy. Passer « bêtement » 5 mn dans la Penalty Box, j’ai déjà donné !

J’entre dans le parc à vélo peu après Caro. Quelle bonne surprise ! Sur Evreux, il me fallait au moins 5 km de course à pieds pour réduire l’écart avec elle en raison de sa natation (elle part 7mn avant et nage vraiment bien). Mieux encore ! J’en frissonne encore en observant les résultats. Je passe loin devant Martin. Si, si. Vous avez bien lu. Je pulvérise le temps du redoutable Martin …

… sur la T2. C’est pas si mal, hein ? Martin terminera près de 7 mn devant moi ; 1er V4. Alors, je me conforte comme je peux. Mais au-delà de la boutade, je suis content d’avoir maîtrisé l’exercice. D’autant mieux que je pars vite.

Pars vite ? A ça non : c’est pas bon. « Pas d’enflammade » comme me disait David, singeant Didier DESCHAMPS. Il a raison. J’ai testé un départ rapide, lors de mon enchaînement de jeudi. Et j’ai bien vu que je ne m’y étais pas suffisamment préparé pour le tenter aujourd’hui. Par ailleurs, il fait très chaud aujourd’hui. L’eau était à 22°C ; le soleil tape fort (30°C annoncés). Je refrène donc cette poussée d’adrénaline : 10 km, c’est 4 fois moins que la distance sur Ironman (selon Martin), mais c’est pas rien.Bien m’en  a pris ! Je crains la chaleur, surtout en début de saison, lorsque mon corps n’a pas eu le temps de s’y habituer. Je reprends des coureurs. D’autres me reprennent. Bref, c’est dur pour tout le monde ! Il n’y a qu’à voir cette photo et ma bouche béante pour vous l’illustrer ! 


Il n’y a qu’à observer, Romaric, maître-nageur à la piscine de Canteleu, que je reprends au début du 2ème tour, alors qu’il est victime de crampe. A ce moment, je suis champion de Canteleu, le début de la gloire !

Alors, je gère ? Non ! Je vous ai déjà écrit ce que je pensais du prétexte de la « gestion ». Je suis vigilant sur l’hydratation et me cale donc sur la meilleure allure possible. Celle qui me permet de courir longtemps, sans trop taper dedans. Celle que je viserai pour le prestigieux marathon de l’Ironman. Bingo ! Pas besoin de montre pour boucler les 10 km en 53 mn.

Beh re-non ! Je vous avais écrit que j’ai couru sans montre ! Mon seul repère était le ravitaillement à 2,5 km de chacune des boucles ; permettant de caler ma prise de boisson isotonique et de m’asperger copieusement d’eau.

Sur la fin de parcours, je ne parviens pas à suivre l’accélération des triathlètes qui me précèdent, désireux de gagner quelques précieuses secondes … mais sur quel temps ? Je longe l’aire de parking, tourne à gauche et aperçois le chronométrage officiel, à proximité de l’arche. La suite, vous la connaissez :





Bref, c’était la forme olympique, pour ce format olympique !