La natation est passée. Je chasse rapidement la pensée du "tout ça pour ça", comprenant les efforts et les séances de natation, que j'ai multipliés cette année : "Focus" ! Je m'engage dans la seconde discipline de cette épreuve : la transition ! 700 mètres, me séparent en effet du début du parcours vélo. Mais, c'est désormais un exercice que je maîtrise : "Focus" !
Point positif, sans être surprenant : comme en natation, je n'ai éprouvé aucune lassitude. Que de la sérénité. Les sorties longues y sont pour beaucoup ; particulièrement mon premier "200", accompagné de qui vous devinez. La vallée de la Durdent, également chère à BipBip, avant les plages de Veulettes et Fécamp. Puis, retour en solo à partir de Bolbec. Le plein de souvenirs et de confiance : merci mon Ironfriend.
En relisant
cet article fondateur de 2017, j'observe quelques pensées prémonitoires. Au-delà de la perspective 2019 avec David, j'y lis Copenhague dans un commentaire de BipBip. Cela me fait sourire : on l'a fait
ensemble !
T2 propre, dans tous les sens du terme, puisque je profite de l'installation pour prendre quelques minutes pour vider ma vessie pour la 2ème fois de la journée .... seulement. Mes compagnons de sortie doivent être surpris. Je devrais être inquiet. Mais je chasse cette pensée.
En route pour le marathon. Il est divisé en 2. La première longe la Meuse et un lotissement, dans une relative solitude. La deuxième est caractéristique des pays nordiques. J'y prends un plaisir non dissimulé, en croisant les citadins, attablés pour nous encourager, en centre-ville. Ils sont vraiment top. Quant à "elles", mon
Guytou, tu n'aurais pas été déçu.
Quand tu cours, en France, tu serres les fesses, de peur qu'un riverain ne te percutes en allant chercher le pain ou prendre l'apéro. Ici, tu lèves les bras pour une hola ! Pas besoin d'être "fluently". Les sourires et les rires s'échangent à souhait. Je suis navré de prendre cet angle social, plutôt que géographique. Je ne peux pas m'en empêcher.
Ma pratique du triathlon est - pardonnez cette évidence - tout sauf individuelle.
Làs ! Le marathon est un monstre. Et l'alimentation, bien plus déterminante que la VMA, pour en venir à bout. A peine 2 gels absorbés sur les deux premières heures. Est-ce l'eau du fleuve, ou celle que je reçois lorsque je m'asperge (trop) abondamment lorsqu'un habitant me propose une douche ? Je ne peux plus rien avaler. A peine de l'eau et du coca. Pas suffisant pour courir comme je l'entendais, dès le 15ème kilomètre. Plus suffisant pour courir tout court, à partir du 20ème. Je comprends mieux ce que signifiaient les "good luck", que se lancent les triathlètes avant le départ. Oui : j'ai suffisamment de vocabulaire anglais, pour connaître la traduction de "luck". Mais je sais maintenant, à mon corps défendant - ou plutôt fatigué - ce que cela signifie. Certains disent que, comme dans un jeu, on n'a que trois "chances" sur Ironman. C'est cruellement vrai. Je suis complétement cuit. Burned !
A l'amorce du 3ème tour, avant la partie délicate ; je m'arrête pour faire le point. Ma malléole gauche est enflée. Signe de mauvaise circulation sanguine. Explication de mes jambes lourdes. Je l'ai montrée à Xavier, de retour mercredi soir. Je crois qu'il a fait une tête similaire à celle que j'ai faite à Copenhague, en observant le pansement purulant de BipBip. Sauf que lui. C'est un guerrier. Non seulement, il a fini. Mais en plus, il a réalisé son meilleur temps, s'approchant des 10h. J'avais titré un paragraphe "
Mon Fred, ce héros". Je ne croyais pas si bien écrire ! Je n'arrive pas à repartir. Quelle déception : j'avais promis à Victoire que je marcherai pas.
Olivier arrive à ma hauteur. Je me souviens bien d'une de nos premières rencontres, lors de ces sorties de MSA Tri, où je m'invitais volontiers. Je profitais des conseils d'Arnaud ; lorsqu'il me le présenta. Il avait d'achevé son premier Ironman, six mois avant.
- Alors ?
Alors, j'ai vu des étoiles qui brillaient encore dans ces yeux. Je me suis promis d'avoir les mêmes à Vichy. J'en frissonne encore. Pour l'heure, mes yeux sont à l'image de mes jambes : vides.
Il terminera en marche rapide, victime d'une tendinite. Je ne parviens même pas à le suivre. Je me souviens précisément de deux phrases de notre bref et sympathique échange.
- Si tu n'es pas à 100% avant, c'est terrible
- N'abandonne pas ; sinon, tu le regretteras.
Merci : tu représentes bien ton club et sa convivialité ! Cela étant, c'est une certitude : je serai bien moins déçu de mettre le clignotant ; que le suis, maintenant, en passant - pour la deuxième fois consécutive - au travers de ma course.
Au ravitaillement suivant, j'engloutis un verre de coca, qui confirme mon intuition. Je vomis. J'arrive à en plaisanter avec les bénévoles. Tant que je ris, c'est que je vis. Irene vient de me doubler sur la bosse du parcours. Je la rejoins en courant. Irene ? C'est l'animatrice du groupe FB, dédié à la préparation de la course. Elle nous donnait régulièrement des infos sur le parcours vélo, la température de l'eau, etc. Toutes ces données importantes pour réussir sa course. Une gentillesse, tranchant avec l'esprit consumériste de bien d'autres triathlètes. Des mecs, qui posent des questions, dont les réponses se trouvent rapidement dans le guide envoyé par l'orga ou 2 posts avant ! Je me présente donc à elle en la remerciant pour ce qu'elle a fait. Je lui explique, dans mon anglais très approximatif, que je ne sais pas ce que je vais dire à mes Chéries, lorsque je le retrouverai dans le parc. Comment leur dire ; à Elles qui partagent cette aventure de fer depuis 5 ans, que je suis sur le point de lâcher ? Je ne sais pas ce qu'elle me répond alors, mais je m'éloigne car je me sens mieux .... et que ça redescend. Dès qu'elle apprendra que j'ai abandonné, Irena me demandera des nouvelles par notre réseau sociale. Une gentillesse appréciable. Une dernière fois : merci Irene.
Me voici dans le parc ; face à mes Chéries et une décision. L'Ironman est une aventure familiale ; mais, cette fois, c'est un moment difficile. La partie "pour le pire", d'un engagement, que j'ai pris auprès de Vanessa, il y a bientôt vingt ans. Ce que je vis à ce moment prouve que l'amour est inconditionnel.
- C'est pas ton chrono et une médaille qui te caractérisent. C'est que tu es mon papa courageux !
Cette force dans les mots de Solène. Dans le regard de Victoire et cette fierté, qu'elle a toujours eu à mon égard. Je ne sais pas si je serai un homme de fer aujourd'hui, mais j'aurai toujours un cœur d'artichaud. Solène. Victoire. Ce ne sont pas des remerciements, qu'il faut que je vous livre aujourd'hui : mais, un gros message d'amour.
envoyé à Irene, le mercredi, sur FB
On décide de tenter de repartir, mais de ne pas me mettre en danger.
"J'embarque mes chéries avec moi. Il y a des limites à ne pas dépasser, comme terminer en titubant à la nuit [en zombie] ou sur une civière, comme on l'a vécu avec un très bon copain, sur mon 1er". Voilà ce que j'écrirai le lendemain à Nathalie qui, comme beaucoup d'entre vous me demandait des nouvelles. Je me dois de vous l'écrire maintenant : vous lire et vous répondre m'aide fortement.
Rédiger pour digérer.
En les perdant de vue, je perds du jus ; que je retrouve dans le centre en faisant le show. Après l'ocytocine, l'adrénaline !
Làs (encore). J'arrive au début de cette interminable partie de course insipide. Non, je n'aurai pas la force mentale de continuer (et) de me traîner. Non, tout cela n'a plus de sens. Cela fait près de 12 heures que je cours : ma marque sur Ironman. Ce chrono qui reflète mon niveau. Moins si ça se passe bien comme à Copenhague. Plus, si j'ai coincé à un moment comme à Arhnem. Or, il me reste une dizaine de kilomètres ; plus 1h30 si j'arrive à alterner marche et course. Plus de 13h30 ?!? Bien plus que ce que j'ai réalisé pour mon 1èr, à Vichy ? Une honte ! A quoi, bon ? Ca n'a aucun sens. Je vis une sorte de Bore-Out sportif.
Usé. Usé par cette course et tout ce qui l'a précédée. Je le pressentais et vous le partageais dans mes dernières publications. Moins de billets et moins d'enthousiasme. J'ai réalisé mes entraînements avec rigueur, mais le frisson manquait trop souvent. Ma tranquillité à l'approche de la course ne reflétait pas uniquement de la sérénité. J'étais un artiste sans le trac comme
la mer sans les vagues (...). L'Ironman ne se limite pas à des chiffres. C'est une guidance. L'engagement doit être quotidien et ne se limite pas à une quinzaine d'heure de training par semaine. "
Science sans conscience n'est que ruine de l'âme" ; écrivait François RABELAIS.
Je me le répète : je serai bien moins déçu de mettre le clignotant ; que le suis, maintenant, en passant - pour la deuxième fois consécutive - au travers de ma course.
Il y a des choses que j'aurai pu mieux faire et ces impondérables, liés au long. Mes Chéries : j'ai été au maximum de mes possibilités physiques et psychologiques du jour. "Jusqu'au bout avec Plaisir !", haranguait l'affiche des Pape. Oui. Je l'ai fait. C'est juste qu'aujourd'hui, le bout était avant la finish line.
Ma décision est prise. Je suis OK.
Je bifurque donc vers l'arrivée où les filles doivent me rejoindre. Aucune larme. Je suis OK. De l'amertume, certes. Mais contre moi-même. Pas contre cette discipline qui a vu naître IronLoulou : Born.
Du plaisir, des amitiés. Au dessus de cela (c'est dire !) un formidable épanouissement personnel et paternel. Bien plus de choses qui me nourrissent que les intuitions limitantes disséminées dans mes derniers billets ; derrière tout le reste. Tout le blog et ce que la Long m'ont apporté.
Comme je vous l'indiquais, nos échanges m'ont fait du bien et m'accompagnent encore. Impossible ici de vous résumer les longues conversations que j'ai eues avec BipBip, David, Quenotte et tous vos mots, apaisant mes maux. Mais, dès 21h, le SMS de ce dernier résumait bien des choses :
"
La boucle est bouclée .... forcément y aura des regrets. L'essentiel n'est plus dans la performance mais dans ce que vous partagez tous les 4 depuis de nombreuses année.
"
La puissance du mollet et la force des mots, Ironfriend !
Oui, je vais partir sur autre chose en 2023. D'autres moyens de m'épanouir, que l'Ironman ; nécessitant une exigence de tous les instants. Sincèrement, cela m'a fait du bien de profiter, dès le retour de Maastricht, d'une soirée chez Olivier. Sans regarder la montre, ou ce que je bois. Idem, chez Christophe, dont je vous reparlerai certainement, en même temps que mes perspectives.
Car ma croissance personnelle ne s'arrête pas avec l'Ironman. D'autres choses sont à découvrir avec pour guidance, le dépassement, le plaisir, les copains et mes chéries.
Allez, avant de vous quitter et après la citation philosophique, le morceau. Sans cela, je ne serai pas fidèle à ce blog !