mercredi 1 décembre 2021

Sisyphe à Maastricht




Trois mois. Il m'a fallu trois bons mois pour descendre "ce foutu rocher", comme le nomme Vincent ; dont on reparlera certainement.


Je suis arrivé là-haut, à Arnhem, avec un sentiment de plénitude inégalé. 


Mais, qu'il défende la symbolique de la montée, comme signe d'absurdité, ou du "plaisir dans l'accomplissement de sa tâche", aucun philosophe n'en évoque la redescente. Elle n'en est pas moins questionnante.


Grimper est une évidence, car on n'a pas d'autres choix. Ne qualifie-ton pas les athlètes longue distance de "machines" ? Le corps et l'esprit savent, de concert, que cela sera difficile. Ils s'y sont préparés et s'adaptent, le cas échéant. 


Mais, la descente rime avec dépression ; celle-là même qui guette les ironmen ou ultratrailers, durant cette période. Comment ne pas songer à de formes bien plus graves, emportant d'anciens sportifs de haut niveau dans l'addiction ; voire pire ? Plus d'objectifs, plus de guidance. L'animal humain n'est pas fait pour être en hyperactivité indéfiniment. Ses ressources physiques et psychiques se sont amenuisées. Il est temps pour lui de retrouver le repos et sa frontière, ténue, avec l'oisiveté. Pourquoi et pour qui faire des efforts supplémentaires ? Entre perte de sens et perte d'essence...


Une réunion familiale et l'absence d'une promotion professionnelle attendue, laissent ressurgir quelques démons, que j'avais tenus éloignés durant l'ascension.


Car si l'Homme cherche tant à se transcender, c'est aussi pour fuir sa condition. Rousseau l'écrivit au sujet de la pitié : "douce,  parcequ'en  se mettant à la place de celui qui souffre, on sent pourtant le plaisir de ne pas souffrir comme lui". Guillaume MARTIN, le fameux vélosophe, l'étend à la générosité : "par le don, on marque sa supériorité sur autrui, on en entérine le fait que lui a un besoin que moi je n'ai pas." Voici donc les références philosophiques ; qui, j'en suis certain, vous avaient manquées.


J'expérimente donc - dans une moindre mesure - ce que beaucoup de sportifs vivent après une compétition importante. En effet, je me sais accompagné et un projet perso va animer mon année 2022, en plus du sport (...). Mais, si mon humeur reste plus constante que ma motivation à l'entraînement, un signe ne trompe pas. Je ne peux plus écouter mes "Ironsongs" ; ces musiques qui ont bercé ma préparation et le  Gelreman. J'en ai tout simplement marre. J'appelle Fred à la rescousse. Non : ni BipBip, ni Quenotte. Mais mon ami de 40 ans, qui m'en a fait découvrir une bonne partie. Il s'exécute en souvenir du bon vieux temps. J'ai quelques pistes de découverte, s'ajoutant à un morceau de l'irremplaçable Joe Satriani. Vous savez combien la musique fait partie de ma "programmation neurolinguistique" ; plus prosaïquement : ma motivation. Je reprends progressivement le goût et l'envie.


Et puis voilà. Allez savoir pourquoi ! Rien de bien à la radio, en rentrant du taf hier soir. J'enclenche machinalement la clef USB, branchée dans l'appareil. Ca commence par Anything for you de Mr. Big ; pour se terminer ce matin avec Hold On Tonight ; avant de couper le moteur au même endroit. Cette chanson avec laquelle s'acheva le Gelreman. En sortant de la voiture, j'ai des larmes aux yeux. Ca doit être la pluie ...


Cette musique, en bas dans la vallée.


Cette musique, pour me dire : "remonte ; rappelle-toi comme c'est bien au sommet". Lita Ford scandant son Kiss me deadly, qui m'inspira un billet.


Finalement, l'histoire de Sisyphe est comme la notre. Il monte et il descend. "C'est cyclique", comme je disais à Fred : BipBip, cette fois. C'est simplement que cette descente fut plus longue car, comme beaucoup, j'ai laissé énormément d'énergie, durant cette préparation de deux ans, émaillée par le COVID. 


Alors, je regarde un autre versant de cette colline ; toujours hollandaise. J'y aperçois une équipe verte qui s'y engage aussi. Pas d'autre choix que de les rejoindre : Vincent et sa bande sont trop sympas ! Surtout, Vanessa avait déjà réservé pour Maastricht dès le 1er septembre !


C'est tellement bon là-haut, avec Elles



La suite prochainement ....



vendredi 3 septembre 2021

Gelreman 2021 : ma dernière œuvre


Le format Ironman® n’a pas failli à sa réputation de course la plus difficile du monde. Oh, non ! Il y a bien des épreuves mettant le corps à plus rude épreuve. Et je pouvais profiter d’une balade et d’une bière locale, dans les rues piétonnes d’Arnhem, dès le lendemain. Si elle est si ardue, c’est qu’en une seule journée, elle peut ruiner les efforts consentis sur cinq cents. La durée de l’effort est aussi impitoyable que les aléas, nombreux. Beaucoup d’amateurs et de professionnels échouent dans la quête du chrono visé. Les défaillances sont légion. En réalisant 12h02, alors que je m’étais préparé pour faire moins de 11, je n’ai pas échappé à cette froide sentence. Pour autant, il y a eu cinq cents jours avant et il y en aura après.

 

En fait, tout se passe comme si l’œuvre de l’artiste était mise à nue sur un seul instant.

 

Flashback musical. Novembre1995. Les Blacks Design jouent à All Music. J’ai eu bien plus de mal à convaincre Olivier d’intégrer Broken is my heart à notre set-up, que le gérant de ce magasin, bien connu des havrais. Il craignait que cela ne fasse trop de chansons lentes. C’est qu’on était des vrais hardos, dont le style n’avait rien à envier à celui de Douceur de vivre.  

Broken is my heart est la première chanson, que j’ai composée. François avait corrigé quelques tournures de mon anglais et prendrait la batterie, ainsi que les cœurs. Fred avait pris le temps de trouver un accompagnement guitare et un solo efficaces. Après notre âpre négociation, Olivier avait obtenu le fait de pouvoir jouer et chanter sur Polly, de Nirvana. Je vous assure : c’était tendu entre nous à ce moment-là. Ce qui ne l’empêcha pas d’être témoin à mon mariage. Bref, le public arrivait et trac avec. La prestation serait-elle à la hauteur de mes espérances ; du temps que j’avais passé à écrire et de l’émotion que je voulais transmettre ?

 

La comparaison avec l’art commence ici. Les points communs sont nombreux, comme je l’ai récemment réalisé, en découvrant le nouveau projet de peinture de Virginie. 

 

D’abord, l’attirance pour la discipline. Plus on découvre les célébrités – quelles concernent des personnes ou des œuvres –   plus on a envie d’en savoir plus. Puis ce sont les premiers essais. Souvenez-vous : ces esquisses perfectibles sur un cahier, le touché de votre pinceau ou de votre pastel sur le Canson®, votre voix étranglée sur cette tirade de théâtre, ce coup de baguette sur une caisse claire, ces accords de guitare tremblants et ce fameux D-G-F ! Pour ceux que cela intéresse, et ne pas perdre les autres, je vous renvoie à mon récit sur l’Ironman de Copenhague, retraçant une partie de cela : http://ironhead-ed.blogspot.com/2019/09/ironman-de-copenhague-le-second-mais-le.html.

 

Passé ce premier contact, il faut acquérir une certaine technique pour évoluer et se faire plaisir. Maîtriser le mélange des couleurs et la tenue de son instrument, placer sa respiration, garder le tempo et gagner en dextérité. Ensuite, l’effort : répéter inlassablement ces gestes, cette gamme pentatonique, cette rythmique. Passer de l’euphorie de l'acquisition ou de la découverte d’un nouveau support, au découragement. C’est inévitable. Il y a toujours ce moment, où l’on plafonne. Il faut s’accrocher. Au démarrage, on pensait sa courbe d’apprentissage exponentielle, avant de l’envisager comme asymptotique. Tiens un souvenir de maths du lycée et pas de philo …. Mais patience : il arrivera !


Bref, en réalité, on progresse plutôt par palier et cela n’est pas toujours facile à gérer. Mais on s’accroche et cela devient un besoin. Chacun y retrouve ce dont il a envie : un subtil dosage de sérénité, d’introspection, de partage et d’accomplissement. Il faut bien de la patience à sa compagne ou son conjoint ! Accepter ces moments d’isolement et d’égocentrisme. Et Dieu sait combien je le suis, à l’approche de l’échéance. Ma chérie : <3 MERCI ! <3 « C’est comme le paracétamol, je ne sais pas pourquoi cela te fait du bien ; mais c’est ainsi ». Car -pardon pour la digression à l’attention des antivax – cette molécule ne passerait pas l’autorisation de mise sur le marché aujourd’hui, dans la mesure où aucun pharmacien n’est capable d’en expliquer le fonctionnement. A l’inverse de l’acide acitila… l’acide acétilu … l’acideacitalé …. de l’autre médicament

 

Il y a toujours un moment de préparation avant de démarrer une nouvelle œuvre. La pose de sa toile, les babeubibobus des acteurs et la balance avant un concert. Ah ! Cette balance à Thérouldeville; des DECIBEL, pour le coup ! Pendant 20 minutes, le régisseur du jour découvre les commandes et oubliera totalement les réglages convenus, ensuite. De la maîtrise de cette étape dépend, en effet, une grande partie de la suite. Un texte éraillé ne rendra pas service à son auteur. Une super musique, avec une mauvaise sono, ne sera pas plus appréciée. Je n'ai pas échappé à cela.


Avouons-le : je ne suis pas heureux de ma phase d'affûtage. Je ne m'étendrai pas là-dessus, car j'en entends déjà me dire "Mais non, c'est super de boucler un Ironman® !". Or, l'acteur sait sur quel sonnet il a butté, tandis que les musiciens débrieferont de leurs points d'amélioration, après avoir reçu quelques félicitations. Oui, au début Olivier jouait trop fort et il m'arrivait d'accélérer. Les copains trouvaient ça génial. Mais les artistes pointent les défauts de leur œuvre et les connaissent. Ils sont en quête d'amélioration. Ce sentiment indispensable à la notion de plaisir, dans l'art comme dans le sport.


Flashback musical. Pendant notre balance et que Fred comme François tentaient de convaincre Olivier de jouer un chouille moins fort, je teste un nouveau son sur le synthé. Son qui ne s'avéra pas le meilleur des choix. Satanée phase de préparation !


Ces propos liminaires posés, place au concert .... à la course !

Il est 6h, quand j'arrive dans le parc à vélo, serein et à l'heure. Faire une compétition seul, permet d'adapter son emploi du temps à sa digestion (...). Je ne suis plus impressionné par les autres concurrents et leur vélo. Le Gelreman est une organisation bien plus modeste que le prestigieux Ironman®. Nous serons moins de 200, là ou ce label peut en compter 5 000 . Cela me permet aussi de ne pas subir le "poids" de l'événement. J'ai scrupuleusement repéré mon emplacement. J'engage la conversation en anglais (si, si !) avec Jörg. Il aura cette gentillesse, parmi tant d'autres, de me prendre en photo. Je sais ce que j'ai à faire et me prépare méticuleusement à la suite.


7h00 : la sirène libératrice ! Celle attendue depuis si longtemps. Aucun groupe ne se dessine vraiment. Ne pouvant donc pas compter sur des pieds pour avancer plus vite, je me concentre sur l'orientation. Les séances à Jumièges m'ont été bénéfiques. J'ai le sentiment de prendre les bons caps et, surtout, les garder. Sur les 3,8 kilomètres d'un Ironman, le calcul est rapide : il vaut mieux nager 2 secondes moins vite aux 100 mètres qu'en faire 200 de plus.







Je sors en 1h17. La natation a été à peine plus lente qu'à Copenhague et je compte bien compenser cela, par une transition éclair. FOCUS ! Tout s'enchaîne comme je l'ai préparé et tant de fois visualisé. J'ai pris ma revanche sur la combinaison, Gaylord ! 2 minutes 45 ; là où j'en ai mis 7 à Copenhague : le rapport coût / efficacité sur cette discipline était bien plus favorable qu'en natation !


Je démarre donc confiant sur cette partie tant attendue : le vélo. Les progrès que j'ai fait cette année laissent augurer un bon chrono. Je découvre avec émerveillement les lagunes ... et avec un peu moins d'enthousiasme le dutch wind qui y sévit ! Je constate très vite qu'il sera difficile de réaliser la moyenne nécessaire à espérer accrocher le Sub11.

"Peu importe le chrono final : en m'entraînant pour Sub 11, j'ai déjà gagné !"

Cette affirmation m'accompagne et me permet de ne pas lâcher maintenant. Ni voyez là, aucune justification a posteriori. Je l'avais déjà énoncé à ceux que j'ai croisés avant mon départ. Car, oui. Viser Sub 11 m'a débloqué. Cela faisait partie de la version IronLoulou 2.0, maintes fois décrite sur ce blog.


Il y a quatre tours. Je prends vraiment plaisir sur le premier. Nous roulons en grande partie sur des pistes cyclables.

- Comment ? Tu n'as pas eu peur de crever, de devoir t'arrêter à chaque intersection ou lorsque des camions y étaient arrêtés

- Du calme, on est en Hollande ; dans un de ces pays nordiques avec de véritables pistes cyclables et pas seulement des prétextes à des inaugurations ....


Place à la concentration sur le deuxième tour, au moyen de ma playlist intérieure. Qu'est-ce qui me ferait du bien, face à ce vent ? Une évidence : Wild in the wind ! Bon Jovi est incontournable en compétition. Je souris à chaque rafale en lui répondant donc "Wild in the Wind". Mais cela se complique au milieu du 3ème tour. Les hollandais sont économes en bitume. Nous roulons sur des routes étroites réservant, certes, de la place pour les cyclistes sur les côtés ; mais laissant de l'espace pour une seule voiture en leur centre. Je me retrouve donc bloqué lorsque l'une d'entre elle s'arrête pour tourner à gauche, en attendant de laisser passer la file de motards, lui faisant face. De même, le partage devient moins évident lorsque nous entrons dans Arnhem et nous faufilons entre les promeneurs. En en dépassant un, je loupe un changement de direction. Après le vent, ces deux aléas scellent définitivement le sort de la perf' espérée à vélo. Le dutch wind se fait plus fort au quatrième tour. Je ne m'attendais pas à ce que ce soit aussi dur, aussi vite. Je m'efforce de temporiser dans la perspective du marathon. Peut-être trop, au regard de l'effondrement de ma vitesse ; peut-être trop tard, au vu de la suite ....


En déposant le vélo, je cours avec des semelles de plomb. Non, pas ces semelles en carbone qui permettent de vendre des chaussures à 400$ pour (espérer) gagner 40 secondes sur marathon ! La douleur à la voute plantaire signifie que j'ai mis trop de braquet en vélo. Les images de ma journaliste de charme parlent d'elles-mêmes. Je m'empresse de la rassurer, et tous les copains qui suivent son reportage "trop de vent pour une perf' ; mais j'suis bien". Je sais pourtant que le marathon promet d'être compliqué.


Là encore, le premier tour se passe bien. Je me suis efforcé de courir relâché, ne cédant pas à l'euphorie.

J'aurai une pensée, souvent programmée, pour des proches à chaque tour. Car, c'est ainsi : l'artiste a besoin et se nourrit de son public.

Je prends le premier élastique en pensant à mes frères et à ma sœur. Cette année, je leur ai spécifiquement explicité que c'était important pour moi, de savoir qu'ils allaient me suivre. Pour sa première, Sam est au taquet ! Je me régalerai de tous les commentaires et vidéos, qu'il a postés depuis le début de la course.  C'est ainsi. Je vous sais là. Et je savoure vraiment la soirée, que je passe à découvrir les marques d'attention de chacun. J'aurai un échange sympa avec Rébecca après le dîner. Mon Petit Frère est fidèle à lui même. C'est mon fan de la première heure ; de la musique au triathlon.

La pensée suivante va naturellement à la Fratrie et la traditionnelle photo des Pape ! J'oublie l'horloge. Pas ce qu'il y a écrit en dessous. Et encore moins les figurants ! David vient de se faire opéré du ménisque : c'est vrai que "j'ai de la chance d'être là, en fait" ; dixit Grégor.


Je pense aux copains de lycée, en m'engageant dans le second tour. Les Blacks, naturellement, avec Zoï qui s'est mis au bike. Jo, toujours aussi talentueux, se prépare à un nouveau Sub3 sur marathon. Ti'Manu et j'en oublie ; mais pas notre Guytou ! "Oh, elle est encore loin la plus belle des hollandaises ; mais je l'embrasserai". Dans la dernière partie, une douleur au bas du dos se réveille : j'ai vraiment mis trop de braquet sur le bike et sursollicité ma chaîne postérieure. "J'ai mal au dos, mais je ne marcherai pas" annonce-je à mes chéries. C'est que j'ai une promesse à tenir ...

Las ! La douleur est trop forte et m'oblige à m'arrêter plusieurs fois pour m'étirer. Ce 3ème tour est un calvaire. Cal'vert titrerait Bertrand, un des copains de MSA Tri, à qui je dédie le bracelet. Je suis déçu. Dans ces moments, les pensées négatives surgissent. Les mêmes pour les artistes que les triathlètes. Ces "J'suis nul", "j'suis pas fait pour ça", "j'y arriverai jamais" , etc.


L'acteur s'arrête au milieu de sa tirade. Il ne retrouve plus son texte.  C'est le couac du musicien : le pain, comme on l'appelait. Que va penser la critique, qui n'avait pas besoin de cela pour t'humilier ? Encore du grain à moudre pour les copains de Trash-mort !


Mais la version IronLoulou 2.0 a apporté quelques anti-malwares. D'abord rester FOCUS. Un pas après l'autre, pour rejoindre le prochain ravitaillement. Et reprendre, ainsi de suite. L'Ironman® est (aussi) fait pour tester et dépasser ses limites. Je ne céderai pas. Il est temps de se reprendre et de mettre en place mes leviers. J'ai recours à la philosophie. Oui, comme promis. Sartre : "L'existence précède l'essence". Je me suis approprié cette formule en lisant le livre de Guillaume Martin. Elle signifie que rien n'est écrit tant qu'on n'a pas agit. Pas question de se définir comme nul, ou comme un cador, avant l'issue de la course. Cette thèse existentialiste a d'ailleurs été reprise par un grand philosophe d'origine néerlandaise. Non, pas Spinoza : Eddie Van Halen !

 Ah, might as well jump, jump

Go ahead and jump

You say you don't know, you won't know until you begin



A ce propos, je ne peux m'empêcher de vous partager les premières paroles de Top of the Word, qui ont animé chacun de mes passage devant mes chéries. L'Ironman® offre ces moments précieux, durant lesquels je suis certain d'être l'homme le plus important à leurs yeux. Leur regard, leurs encouragements : c'est le père qui s'accomplit au travers de l'épreuve ; et c'est encore plus fort.



Ne me demandez pas pourquoi - ainsi en va-t-il de la magie du "Long" et de l'art - Mais je me sens vraiment mieux sur le 4ème. Un soupçon de paracétamol, un cocktail d'endorphines et d'adrénaline, envoyé tardivement par le cerveau pour masquer la douleur et la tête ! Ma tête ! Vous l'avais lu dans mon dernier billet : je m'étais préparé à "danser avec la douleur". C'est juste qu'elle est arrivée trop vite. C'est juste que ce tour, marquant le début du deuxième semi, je le réservais depuis longtemps à Fred-BipBip. "Si je cours, tu cours !". Ces hormones et la satisfaction d'avoir repris le dessus me stimulent. Quel bonheur ! J'ai l'impression - qui n'en est qu'une - de voler. La différence entre le ressenti et le chrono est à l'image de notre scène préférée du film du Palmashow.






J'entame le cinquième tour en annonçant à Solène "La Normandie va mieux". "Je vais me faire plaisir sur les deux derniers". Plaisir ! Plaisir ! Plaisir  ! ont scandé nombre d'entre vous. Je me passe une musique, que je n'appréciais que dans certains moments d'euphorie. Oui, ma Quenotte. Les copains, ça va pogotter fort : Cours vite !


Le dernier tour est pour moi. Je le savoure ainsi que ces deux chansons. D'abord, Hold On Tonight, de Heaven's Edge. Sa mélodie et son texte me touchent : "profite maintenant pour ne pas regretter". C’est beau. Les larmes me viennent, en remerciant intérieurement Fred de me l'avoir fait découvrir, avec tant d'autres choses de l'art musical ! Je termine par celle, dont je vous ai déjà parlée ; car embrasser la finish line, deux fois, ne m'a pas suffi : Kiss me deadly !  Je suis très heureux de tout se qui se concrétise au niveau mental, en particulier. Ce que j'ai découvert et travaillé, avec tant de plaisir à l'entraînement. Ce que je vous relate dans ce blog, à l'image d'un backstage.

Car, pour l'artiste, le chemin et aussi important que la destination, la réalisation.


Je réalise mon geste final. Cette fois, mon index tape ma casquette pour indiquer l'importance qu'a eu le mental pour boucler mon troisième Ironman® et dans le plaisir à le préparer. Et j'embrasse ma hollandaise.




Le chrono affiche la sentence : 12h02. J'avais visé 11h. Jamais je ne m'étais autant préparé. Plus qu'un sentiment aigre-doux ; ce hiatus entre la contreperf' et  la satisfaction de ce que j'ai vécu durant ces 501 jours.

                             

Flashback musical. Nous sommes chez Fred, avec Virginie. On écoute la prise de son, effectuée sur le poste radio de Bruno. Du matériel fiable, qui ne sature pas sous mes coups de cymbale, lorsque François monte dans les aigus ou qu'Olivier joue trop fort. Malgré les retours positifs, je ne suis pas satisfait. La prestation n'est pas à la hauteur de mes attentes ; du temps que j’avais passé à écrire et de l’émotion que je voulais transmettre.

 

Est-ce que j'ai arrêté de composer ? Dans cette perspective, est-ce que je vais continuer de courir sur Ironman® ? Ouvrez le classeur vert, sur laquelle la médaille  était posée et vous saurez.

 



C'est tellement fort ce qu'on vit quand on compose, qu'on prépare et qu'on joue en concert ! Toute ressemblance avec ce que je viens de vivre n'est décidément pas fortuite ....

 

 

 

jeudi 29 juillet 2021

Vacances studieuses, vacances heureuses

 


N'ayez crainte, en voyant ces livres. Je ne me suis pas  préparé à un nouveau confinement ; dont j'aurais eu la primeur de l'information. C'est juste que je suis parti en vacances. Et que ce contexte est propice à la lecture et bien d'autres choses aussi utiles qu'agréables, que je m'en vais vous conter.


N'ayez crainte, je n'ai cependant pas prévu de vous dresser une fiche de lecture très détaillée de ces ouvrages. Je laisse cette épreuve de bac de français, à ma fille, qui l'a bien mieux réussi que son père. Ce qui, il faut bien l'avouer, n'était pas très difficile. Les notes, qu'elle a obtenues, lui permettent de faire le plein de confiance pour la suite. Et c'est vraiment l'essentiel.


Avec Vanessa, nous nous délectons des Petites histoires de dominations sportives. Les journalistes y expliquent pourquoi certaines nations brillent dans des sports qu'elles ont choisis, notamment car ils répondent à un socle de valeur .... ainsi qu'à la nécessité de marquer des points dans ce domaine méconnu de la diplomatie mondiale. Ca n'a l'air de rien, mais voir les Pays-Bas truster les premières places en patinage de vitesse, alors que leur point culminant avoisine 323 m, n'a rien d'intuitif. Cela nous donne aussi un avant-goût de l'escapade attendue à Arnhem, à la fin du mois d'août. Visiblement, il n'y a pas qu'un triathlon sympathique, des tulipes et du fromage là-bas !


Je savoure le recueil de Virginie TROUSSEAU. J'y observe les pensées de champions, thème par thème. Quand Bixente LIZARARU et Vincent CLERC sont devenus les champions qu'on connaît, après qu'on leur ait asséné qu'ils étaient trop petits, leur volonté de dépassement inspire. Je me suis délecté des chapitres sur la motivation intrinsèque, la compétition et l'aboutissement. Ceux portant les blessures et la gloire peuvent encore attendre !


Edité par Amphora, Sports d'endurance : repoussez vos limites est aussi instructif que rigoureux. Je l'ai relu avec assiduité et avidité. Focalisé sur nos sports d'endurance, sa thèse est simple : le point de rupture est inévitable. Autant s'y préparer et trouver les outils de préparation mentale adéquates. La gestion de ce "breaking point" est ce qui caractérise nos disciplines. Ce qui fait la différence entre le podium des pro et le top 20. Ce qui distingue une compétition aboutie, d'un "simple" T-shirt de finisher, nonobstant sa valeur. Ce qui me permettra de tendre vers mon Objectif ou de le voir s'éloigner. Cette pensée m'a fortement inspiré. Je me suis surpris à sourire et même me dire, quand j'arrivais dans le dur d'une séance : "Youpi ! La douleur ! Tu es là ? Je t'attendais. On joue ensemble ?". Effet garanti ! Les sorties longues sont super bien passées, notamment en course à pieds. J'ai donc fait mienne cette citation issue d'un film "émoulsifiant" visionné lors de mes longues séances de vélo d'appartement hivernales. 100 mètres, est inspirée de l'histoire de Ramon Arroyo Pietro. Un type qui se décide à faire un Ironman®, après avoir appris qu'il était atteint de sclérose en plaques. On y chiale presque autant que devant De toutes de nos forces. "Presque" ; car il ne faudrait quand même pas qu'un film espagnol soit meilleur qu'un français ! On y entend cette remarque de son beau-père, qui le coache : "Vois la douleur comme une mauvaise partenaire de danse. Tu as juste à veiller à ce qu'elle ne te marche pas sur les pieds". Une version hispanique de fameux "Embrace your pain", que je m'approprie vraiment bien mieux aujourd'hui. 


Durant mes sorties longues "je gère, en ralentissant à vélo ou en marchant, à cause de la douleur" a laissé place à "je m'amuse à continuer avec elle". Le savoir laisse progressivement place à la connaissance. Pourvu que j'arrive à exporter cette découverte et la résolution sous-jacente, fin août !



Mais ce n'est pourtant ni là, ni dans les statistiques d'entraînement, que ces vacances m'ont le plus boosté. D'abord ce plein d'ocytocine avec Vanessa et Solène ; Victoire étant restée sur Canteleu pour garder des animaux de compagnie d'une dame et ... Bon ! On ne s'est pas fait d'illusions : on a été jeunes aussi. Elle a grandi et on se fait vieux !


Ensuite, un après-midi avec David et Anne "à mi-chemin" à La Rochelle. Que c'était bon de se retrouver ! Le surlendemain, je roulerai avec grand plaisir avec un autre petit homme vert : Gaylord. On habite à une dizaine de bornes, l'un de l'autre. Il faudra en faire 550 pour partager à nouveau un bon bout de route, après un de ces BTD de Mont-Saint-Aignan Tri, si appréciés. La semaine suivante, on fera "warmshower" pour Ben et sa famille. Le "warmshower", c'est une personne qui propose à minima - comme la traduction le laisse deviner - une douche chaude et de quoi dormir aux bikers itinérants. C'est souvent une belle occasion d'échanges. On était heureux de recevoir Quenotte en 2020 au même endroit. Pour le moment, on ne le fait qu'en vacances et avec les amis. Mais quel pied ! Ben ? Je vous en ai souvent parlé. C'est lui qui m'a transmis le virus du tri et le vélo qui allait avec. Ben, avec qui j'ai aussi partagé l'Ironman® de Vichy et des tas d'autres trucs. Avec ses 3 femmes (aussi !), il a pris une année sabbatique pour réaliser un tour de monde à vélo ; devenant un tour de "là où on peut se poser en Europe", pour les raisons que vous devinez ....



Bref, IronLoulou 2.0, c'est la connaissance qui fait place au savoir ; l'appropriation et le plaisir dans la difficulté qui remplacent sa soumission plaintive. Mais il y a un module qui en fait et en fera toujours partie : l'Amitié.







mercredi 30 juin 2021

9 semaines 1/2

9 semaines 1/2. L'été sera chaud. Oui, très chaud.


9 semaines 1/2. Je la désire tellement ...

9 semaines 1/2. Elle ... la finish line !

9 semaines 1/2 : c'est le temps qu'il me reste avant de consulter mon chrono ; espérant qu'il affiche moins de 11 heures.

9 semaines 1/2 : c'est surtout une centaine de séances, mobilité et prépa mentale comprises, pour tendre vers la course la plus aboutie possible.

9 semaines 1/2 : c'est l'épaisseur du trait. Cela fait près 90 semaines que je m'entraîne vers cet objectif. J'ai donc fait 90% du travail. Ne reste donc que 10% ... probablement les plus importants.

9 semaines 1/2 :  « Je ressens comme un immense besoin d’y être … j’en peux plus en fait ! ». Pensées à ma Quenotte, me délivrant cette fulgurance le 2 août 2017. Avant de vivre ce truc énorme ; liant à jamais les Ironfriends.

9 semaines 1/2 et ce pas de géant. 

Vous le comprendrez, en lisant ces lignes, que je partageais avec le groupe FB de l'Académie de La Haute Performance. Elle a été fondée par Pierre DAVID, ancien sportif de haut niveau. Son livre a été probablement bien plus percutant que sa savate (puisqu'il venait de cette discipline de la boxe), pour nombre d'entre nous.

Après avoir dévoré L’Identité Gagnante, je me suis plongé dans le dernier bouquin de Martin FOURCADE. J’y souligne avec application les états d’esprit qu’il décrit : maîtrise de son sport, sérénité, détermination, esprit conquérant, etc.
Et WHAOU ! Avant, comme l’illustre souvent Pierre, je le mettais sur un piédestal*. J’enviais cet « avoir » de sensations. Je m’obnubilais dans le chemin du « faire » : « il faut que trouve de la détermination, de la compétitivité, etc.»
Je me suis simplement rendu compte que j’avais cela en moi. Que « je suis » cela ou que je le « deviens », grâce à cet objectif de Sub 11 sur Ironman.
« L’important n’est pas ce que fais, mais ce que je deviens ».
Un « phénomène » ce livre, ton livre Pierre David OZ ; puisque tu apprécies la sémantique. MERCI !

* ce qui n’empêche pas d’apprécier les performances de ce champion, et pas que…


9 semaines 1/2. L'été sera chaud. Oui, très chaud.




PS : le lecteur et le fan avertis, auront noté que je suis plus près de 8 semaines 1/2, que des 9 semaines 1/2. Ce titre boostera probablement la fréquentation du blog ; mais pas autant que la motivation et la confiance qui m'animent !








jeudi 20 mai 2021

BTD 1/4

 



Puisqu'on ne change pas une équipe qui gagne, ma programmation 2021 sera à nouveau jalonnée de BTD : "Big Training Day". 


J'avais réalisé l'un des tous premiers, il y a tout juste quatre ans avec Quenotte et ma "Team Vichy" . Je suis persuadé que ce sont des séances importantes pour la réussite d'un Ironman et, surtout, j'y prends beaucoup de plaisir.


Mais, il y a pas mal de choses qui ont changé avec le COVID ; notamment moins de sorties avec les copains. Au début, c'est parce qu'on respecte les contraintes sanitaires et qu'on veut protéger nos anciens. Et puis, les niveaux se distendent, comme la fréquence des retrouvailles. Paradoxalement, ce n'est pas si mal, car c'est aussi bon pour la tête que pour les jambes.


Alors quand nous avons décidé d'annuler le BTD du WE de l'Ascension, en raison d'un impossible PDC, j'étais serein. Pas de natation à Jumièges, en raison de la température de l'eau, pour ceux qui n'auraient pas compris ou n'auraient pas vu ce sketch. Restait donc l'idée de réaliser un long duathlon seul. 1h à pieds à la place de la nat ; puis 3h de vélo avant un enchaînement de run. Mais je n'étais pas pleinement convaincu de ce choix ; conscient de la fatigue générée et du rythme auquel je risquais de terminer la course : lent, très lent !

Un entretien express avec Coach BipBip d'ordonnancer les objectifs de la séance :
- faire une longue une sortie longue spécifique
- pour se mettre dans les conditions de courses
emmagasiner de la confiance

En tous cas,  "ce n'est pas fait pour [se] flinguer, pour la suite". Donc, le multi-enchaînement, qu'il m'a proposé, me séduit. 1h30 de vélo - 30 mn de run appliqué - 1h30 de vélo - 30 mn de run appliqué. Oui. L'essentiel était là ; transversal aux trois points : Le Marathon ; ce ... p... de marathon. Le juge de paix de l'Ironman. Faut l'bosser. Savoir courir au bon rythme, en préfatigue. La séance était idéale en ce sens.


Se mettre en condition de courses ... 

Ca veut d'abord dire que tu pars à l'heure prévue. Pas de procrastination et d'adaptation de la séance. Il flotte. Je décolle à 9h00, comme en atteste la photo introductive. Et je suis heureux de retrouver cette météo. Après tout, mon épreuve n'aura pas lieu dans le sud ; donc il faut que je me prépare à cette éventualité. Que je roule avec mes roues aéros, que je n'avais pas osé prendre à Copenhague.

La première cession de vélo passe crème. Après une vingtaine de minute, je mets la plaque. Je ne la quitterai plus ; même dans la bosse de fin de parcours. Surtout, je prends vraiment plaisir sur les routes qui me permettent la position CLM. Les vallées de l'Austreberthe, puis de la Seine, sont idéales pour cela ; et également pour les yeux. Cela fait près de quinze ans que je les emprunte sans lassitude.

J'avale un gel avant une première transition, assez longue. Tout le matos était prêt. Mais il me fallait le temps de changer de haut, de chaussettes et de faire une pissette. Car, oui : il pleut.

"Je vais arrêter d'afficher la vitesse instantanée sur le Garmin : ça me fait plus de mal, que de bien" ; avais-je annoncé à Coach BipBip. Je pars donc pour un run en me concentrant sur les sensations.  Le cardio les confirme. Je suis dans ma zone, appréciant ces foulées. Me remémorant ce temps - jadis- où la course à pieds était mon point fort en triathlon. En réalité, c'est juste que je débutais les deux autres ! Mais pour la prose et le mental, c'est mieux de songer à cette vérité.

Deuxième transition. Je saute sur le vélo avec des chaussettes, déjà humides. J'ai du mal à enfiler mes chaussures en roulant de ce fait ; mais ne suis pas inquiet. David va m'en donner une paire, bien plus adaptée pour cet exercice singulier de "saute en marche". Je parle de triathlon, bien entendu ...

Je démarre avec ma traditionnelle image des Pape. Tant qu'à faire comme en compet', rien n'empêche de s'entraîner à trouver ces pensées positives. Cette fois, deux cookies préparés par leur fille, remplacent la traditionnelle et indispensable photo. Sous la pluie battante, cette ostie me fait le plus grand bien. Ensuite, toujours ces délicieuses portions roulantes. Et de la concentration sur les villes, que je traverse à l'heure des vieux. C'est étrange. A cette période, je devrais lutter contre l'odeur des barbecues. Là, c'est contre l'envie d'uriner. Je ne vous l'ai pas dit ? Il flotte comme vache qui pisse. Alors, je fais comme en compét'....

Troisième transition beaucoup plus rapide. Toujours après un gel, comme le jour J. Mais, ne vous fiez pas au chrono. Il s'est coupé au moment où je changer de haut. Car, je ne vous l'ai pas dit ? Si ? Bon. Le seul truc, c'est que je n'avais prévu que deux paires de chaussettes. Donc, j'enfile mes chaussure sans cette protection, comme en distance sprint. 

Toujours de la course aux sensations. Je commence à ressentir un début de douleur dans le bas du dos, provoquant un boitement, que je connais. Pas tant le mien, que je devrais craindre, que celui de Lionel Sanders en 2017, que j'admire. Plutôt qu'une vidéo et une longue explication, je vous renvoie au récit des Championnats du Monde d'Hawaï de vous-savez-qui. Exemplaire. Hop. Un petit "Crush of love" de circonstance. Car, je ne vous l'ai pas dit ? Si ? ll pleut. La chanson passe en boucle dans ma tête et la fin du run passe crème. A vrai dire, comme l'ensemble de la sortie.


4h10.

C'était donc une bonne séance longue ; pour reprendre les objectifs que je m'étais fixés. Quant à la confiance, elle est là. Bien encrée. Les chronos de la course à pieds, très réguliers et affichant plus de 11km/h la renforcent. Mais, ne rêvons pas. Je ne courrai pas à cette vitesse le jour J.  Cela étant, cette marque me conforte dans l'espoir de taper un 4h15 sur Le marathon ; indispensable pour entrer Sub11.




La suite dans 4 semaines ....